En 1835, l'aristocrate écossais James Erskine Murray, relate dan son livre Un été dans les Pyrénées ( traduit en Français par Pierre Dareux et publié aux éditions Loubatières), sa descente en diligence sur Caudiès:
"...On quitte le sommet de la chaîne par un étroit passage dont l'entrée était jadis gardée par un fort construit sur les rochers à cet endroit, et de là, le voyageur peut embrasser du regard les plaines du Roussillon et apercevoir la route qui descend la montagne en lacets pour aboutir dans la vallée à plusieurs milliers de pieds au-dessous.*
Peu de routes, même dans les parties les plus hautes des Pyrénées, descendent en pente aussi rapides aucunen'est aussi étroite ni aussi peu protégée, sans aucun parapet alors qu'elle domine l'à-pic, accrochée qu'elle est au flanc de la montagne.
Après avoir déposé le vieux fort et mis aux roues les chaînes d'enrayage, le cocher mit les chevaux au galop et entama la descente.
...Les rochers étaient presque au-dessus de nos têtes et alors que nous descendions à cette allure, un énorme bloc de pierre, qui pesait peut-être vingt ou trente tonnes, détaché de son emplacement par les pluies de la nuit précédente, dévala la montagne et, heurtant la route étroite à quelques mètres devant nous, en entraina la moitié dans la vallée. ... s'arrêter était impossible, l'allure à laquelle nous allions et l'élan donné à la voiture nous l'interdisaient tout à fait, même s'il y avait eu des harnais pour retenir les chevaux, ce qui n'était pas le cas. ...nous passâmes au galop sur ce qui restait de corniche, et qui était à peine assez large pour les roues de la voiture, et, en me retournant, je pus voir un autre morceau la route s'effondrer dans le ravin à cause du choc causé par la diligence. ...
* Altitude col de Saint-Louis: 696 m
...Au pied de la descente se trouve le village de Caudiès ...et les villageois se rassemblèrent autour du cocher pour écouter son histoire...qu'il conviendrait d'envoyer quelqu'un de l'autre côté de la crête pour avertir que cet accident s'était produit et qu'il était impossible de passer, et un groupe de gens se mit en route pour le faire. (...)
Cette route dangereuse a été longtemps la seule voie de communication avec Quillan, la route par le défilé de Pierre-Lys n'ayant été classée comme départementale qu'en 1855. Ceci explique qu'en 1839, le Duc Philippe d'Orléans et son épouse, qui devaient embarquer à Port-Vendres pour l'Algérie, soient passés par la route (à l'époque fort raide pour les attelages) du col St Louis en venant de Limoux. Dans son ouvrage "Voyages des Altesses Royales en Roussillon" * François Fabre relate notamment leur déjeuner sur place, endroit marqué par une plaque commémorative.
* ouvrage consultable à la Bibliothèque Municipale (Rayon Caudiès)
Après avoir emprunté cette route dont la pente nécessitait de dételer les chevaux et de passer les marchandises bras d'hommes, le Duc d'Orléans, prit un décret autorisant le conseil général des Pyrénées orientales à construire un ouvrage à péage ( premier pont à péage).
Note;
Jean-Paul Tricoire apporte cette précision:
"Si on voulait être rigoureux au point de vue historique, on soulignerait que le projet du viaduc dans la montée du col de Saint-Louis est antérieure au passage du duc d'Orléans et de son épouse. Le projet date de 1794, lors de la guerre contre la Première Coalition dont faisait partie l'Espagne. Cette route du col de Saint-Louis était une voie logistique majeure de l'armée des Pyrénées-Orientales. Le projet n'avait pas vu le jour car la paix avec l'Espagne, après la prise de Rosas et Figueras, est intervenue avant la construction du pont. Il est revenu à la surface, un demi siècle plus tard, lors du passage du duc d'Orléans
Les travaux prennent du retard, permettant le développement du projet de route par le défilé de Pierre-Lys, soutenu par le Conseil Général de l'Aude, et combattu par les Caudiésiens par pétition portée devant le conseil Général des Pyrénées Orientales au cours de sa séance du 26 août 1843, en présence du préfet. (gallica.bnf.fr)
Dans le Courrier de l'Aude du 8 semble 1858 est publiée cette demande de travaux.
Dans les délibérations du Conseil Général de 1908, sont notées des travaux de réfection de la chaussée de la route du col Saint-Louis.
Dans le bulletin du Club Alpin Français de 1903, on trouve la description suivant:
"De Caudiès, une longue montée, ancienne route de Perpignan à Bayonne, conduit à la forêt des Fanges de 11,000 hectares, une des plus belles forêts de France. La route est tellement sinueuse qu'en un endroit, elle franchit un ravin sur un viaduc sous l'arche duquel, elle passe immédiatement après. Elle atteint le col de Saint-Louis...."
Ce viaduc en colimaçon a été conçu par un Ingénieur des Ponts et Chaussées, Étienne Raymond Amiel (1752-1832).
Pour l'anecdote, c'est lui qui a donné son nom au domaine viticole du "Mas Amiel" (ex "Domaine de Goudous") qu'il avait gagné au jeu aux dépens de l'évêque de Perpignan, en 1816.
L'article publié avec la photo, retrace l' étape Quillan - Caudiès d'un voyage en bicyclette dans les Pyrénées
et en 1999, les cyclos Formica (Quillan) au col Saint-Louis.
Les boute-roues du pont du col St Louis
dans une lettre écrite par Louis Rieuvernet en 1984:
" J'avais dix ou douze ans quand, passant sur le pont du col St Louis, je remarquais que la pierre des boute-roues placés de loin en loin, n'étaient pas de même nature que celles des pierres taillées qui avaient servi à bâtir les arches. J'ai sans doute demandé à mon père pourquoi cette différence et de quelle carrière elles avaient été extraites. Mon père l'ignorait sans doute et dut me répondre "C'est une pierre à aiguiser". Je sus plus tard qu'elles étaient en grès et que les paysans qui allaient couper du bois aux Fanges y affutaient leurs haches. Depuis je suis passé bien des fois sur ce pont mais toujours ignorant d'où provenaient ces grès. Il y a une vingtaine d'années, Raymond Martignoles, chasseur de sangliers qui savait que je cherchais des trous, m'indiqua que dans les environs de Rennes il y avait une source dont l'eau salée sortait effectivement d'un trou. M'y étant rendu, je n'eus aucune difficulté pour reconnaître dans le lit du ruisseau les blocs de grès semblables à ceux qui m'avaient si longtemps intrigués..."
Dans les années 1960, des objets "Souvenir de Caudiès" étaient vendus à l'épicerie Tricoire. C'est le cas de cette assiette achetée par Jeanne Vidal, épouse Jorda.
D'autres objets étaient décorés, représentant de Notre-Dame de La Val.
Le samedi 10 juillet 2021, Le Tour de France lors de sa 14ème étape (Carcassonne - Quillan ) emprunte pour la première fois la route du Col Saint-Louis.
Parmi les festivités qui ont accompagné le passage du Tour de France à Caudiès, Arts en Fenouillèdes a organisé une exposition "Arts en Fenouillèdes fête la Petite
Reine", avec notamment ces tableaux de Mireille Boix et d'Andrée Tricoire.
et le Poème de Pierre Armagnac:
En cliquant sur le bouton, vous pouvez voir l'intégralité de l'exposition. Vous quittez le site du Musée Virtuel; pour y revenir, fermez l'onglet.
En août 2021, Pierre Tricoire fait cette très belle photo du Viaduc avec un drone, que Jean-Paul Tricoire a commentée.
"Vue depuis un drone (Pierre Tricoire) du viaduc dans la montée du col de Saint-Louis à Caudiès de Fenouillèdes. On distingue, en bas et à gauche, un éperon résiduel de la redoute de Schomberg. A la fin du XIII ème siècle, est construit un fortin à cet emplacement pour contrôler la montée vers le col, itinéraire majeur entre Barcelone et Toulouse. Le fortin est détruit par les Espagnols en 1542. En 1630, Charles de Schomberg, gouverneur du Languedoc, fait édifier une redoute sur les ruines du fortin de Philippe III. En 1793, François Roussel, caudiésien membre du directoire du département, et l'ingénieur Amiel dirigent des travaux pour rendre l'itinéraire plus carrossable (voie logistique de l'armée des Pyrénées-Orientales face à l'armée espagnole /guerre de la 1ère coalition). L'ingénieur Amiel envisage alors le projet de ce pont en escargot. Projet qui ne voit pas le jour, la paix ayant été signée avec l'Espagne. Le 15 septembre 1839, le passage du duc d'Orléans, en route vers l'Algérie (plaque commémorative non loin du pont), relance le projet. La redoute de Schomberg a servi partiellement de carrière de pierres."
Le Château des Maures ou La Redoute
Selon Jean Abelanet (In Lieux et Légendes du Roussillon et des Pyrénées Catalanes, ed Trabucaire 1999):
"...Et nous retrouvons un Castell dels Moros, à Caudiers de Fenolleda, dans une boucle en lacet de la D9, au col Saint-Louis: il s'agit des ruines du château fort médiéval, construit en 1258 et détruit en 1542, qui surveillait le principal accès du Fenouillèdes vers le royaume de France."
Cliquez sur ces photos d'Août 2021 pour les agrandir.
Pour André Sottou: " Il faut noter par ailleurs que non loin des deux châteaux qui viennent d'être mentionnés, l'un des successeurs de Saint Louis, le roi de France Philippe-le-Bel, fit édifier un troisième château destiné à garder l'importante voie- stratégique menant de Carcassonne à Perpignan par les vallées, de l'Aude jusqu'à Quillan (au-delà, le défilé de Pierre-Lys n'a été ouvert à la circulation qu'en 1867), de la Boulzanne et de l'Agly. C'est en effet à proximité du col de Saint- Louis, placé au débouché de la vallée de Saint-Bertrand où Philippe-le-Bel avait fondé une bastide perpétuant le souvenir de son grand-père (c'est le village de Saint-Louis), que fut édifié un fortin appelé aujourd'hui Château des Maures — bien qu'il ne date que du xrv* siècle — mais dont le vrai nom est Les Portes de Saint-Louis. Ce château est comparable à la fois par son nom, sa date et sa fonction au château de Portes, dans les Cévennes, à 22 km au nord d'Alès, qui fut aussi bâti au xrv* siècle, sur la voie Regordane, au débouché de la plaine du Bas-Languedoc." (Identification des 2 châteaux et de l'abbaye de Fenouillet dans Annales du Midi 1973 /85-114 persee.fr)
Louis Fédié, écrivait déjà en 1880 (In Comté de Razès et Diocèse d'Alet) :"Nous n'avons aucun document historique à invoquer à l'appui de l'origine sarrazine de ce château-fort; mais la tradition locale a acquis sur ce point une grande autorité, car elle n'a jamais été contredite par aucun historien. Même après que le château des Maures ait été reconstruit par les rois de France et fût devenue une forteresse du pays frontière, le nom primitif a survécu et s'est continué jusqu'à nos jours.
Au quatorzième siècle, l'ancien château des Maures devint une forteresse royale que l'on appelle la porte de Saint-Louis. Ce nom fut donné parce que l'on ne se borna pas à relever l'ancien château , on construisit de l'autre côté du chemin au pied du Trophée de Pompée un fortin qui rendait ainsi plus facile la garde du passage. Aucun historien n'a fait mention de cette place forte. Cependant, elle a eu son rôle dans l'histoire et la forteresse principale a existé jusqu'à la Révolution; mais ce n'était dans les derniers temps qu'un simple poste de vétérans. Nous croyons même que ce poste fut rétabli pendant les guerres d'Espagne, sous l'Empire.
Lorsqu'en 1542, les Espagnols s'emparèrent de Caudiès et firent des ravages dans la contrée, ils détruisirent la Porte de Saint-Louis.
Un document authentique qu'il nous a été donné de consulter nous permet de constater qu'en 1741, la Porte de Saint-Louis existait encore bien qu'ayant peu d'importance. La forteresse principale et le fortin sont signalés et marqués sur un plan de la Forêt des Fanges déposé dans les archives de la commune de Saint-Louis."
Une étude plus récente de la Redoute (Mai 2010) a été faite par Claude Parayre (transmise par Jean-Marie Alary) qui avait déjà permis au site de publier son excellent travail sur Castel Fizel. Elle est donc reproduite ici Intégralement.
La Fenêtre des voleurs
Cette photo prise avec un drone anafi montre la vue à partir de la fenêtre des voleurs, qu'avaient les trabucayres qui attendaient les diligences (le tracé de la route était un peu différent).
François FABRE rapporte la légende attachée au Col Saint Louis (Folklore- Revue d'Ethnographie Méridionale 1978 N°4).
Albert Bayrou relève dans les délibérations consulaires (In Caudiès-de-Fenouillèdes, à la recherche du passé):
1681, 5 octobre - Les consuls sont autorisés à réquisitionner des habitants pour courir sus aux voleurs qui se trouvent au col de Saint Louis: il leur sera payé dix sols par jour, tant pour leur dépense que pour les munitions de guerre.
Entrée dans le village
La Dépêche du 12 novembre 1892 rapporte aussi ces inondations
Albert Bayrou note
1923 - La réfection du pont de Quillan est envisagée.
- 12 juin, vote d'une somme de 7000 F pour la réfection du pont.
Louis Fédié, dans son ouvrage "Le comté de Razés et le diocèse d'Alet" publié en 1880, décrit le site du village à deux époques différentes.
D'abord après la croisade contre les Albigeois et sous le règne des vicomtes de Fenouillet:
"...Il occupait, à cette époque, la partie comprise dans le quartier que l'on appelle de nos jours le Fort. Le Casrum du douzième siècle était une vraie forteresse dominant au couchant le cours de la Boulzanne du haut d'une falaise taillée à pic, et entourée sur les autres côtés, de murailles et de bastions. Un fossé profond était creusé au pied des fortifications, et formait un demi-cercle dont la Boulzanne était la base." ...
Ensuite, après la conquête du Roussillon:
"...A dater de cette époque, n'étant plus pays frontière, cette ville acquit plus d'importance et subit une transformation qui en augmenta l'agrément. Les fossés qui entouraient le fort furent comblés, et sur leur emplacement fut tracé un boulevard de quinze mètres de largeur qui se termine par une magnifique place." ...